#656
30 novembre Karl Dubost n’aime pas sa chambre . Espace sans intimité , promiscuité qui ronge les angles. La pièce partagée cesse d’avoir une âme : elle n’a plus rien de personnel. Une pièce à vivre qui ne vit plus. Je n’avais jamais pensé aux pièces que j’habite. Peut-être p arce qu’aucune ne m’a jamais réellement appartenu. J’ai le soupçon que la seule chambre intime est en moi, enclave invisible, tunnel où tout se contracte et d’où j’écris — au café, sur le muret de marbre, dans le taxi, dans « notre » chambre, adossé au souffle endormi de T. ; sur le bureau d’Isabelle, au milieu de ses fournitures, de ses poupées ; sur la cuvette des toilettes, dans l’ascenseur. Partout où je ne suis pas moi. Partout où je ne suis pas seul. Pour être seul, il faut des autres. Pour être moi, il faut m’échapper. Ici, maintenant, je me suis enfermé dans la chambre d’ Isabelle. Derrière la porte, la musique, les bruits de cuisine, les voix, les placards qui grincent. Chaque son est une intrusion,...