#461
Ça commence. Je lui ai demandé de ne plus penser, seulement ressentir. Je désire lui apprendre à écouter de la musique, avec la certitude que ça peut changer sa vie. La présence de S. m'envahit. Je ne pense qu'à lui alors que l'aria continue. J'ai soudain envie de lui dire quelque-chose. Mais je me retiens. Je regarde les mouvements de son visage aux paupières closes, essaie de deviner les émotions qui le traversent. J'admire l'effort qu'il fait pour écouter une musique si éloignée de ses goûts. Je n'écoute rien. L'aria n'est plus que le bruit de fond de mon arrière pensée, parasité par l'impatience de savoir ce que S. en pense. Je cherche déjà les mots à dire une fois l'aria achevé. Et je prends conscience, à cet instant là, qu'il est en train de me donner à son insu une leçon d'écoute, lui qui ne pense plus à rien, ni à moi, ni à personne. Il se tait admirablement et accueille jusqu'à la dernière note, jusqu'au silence après la musique, le chant de la Callas comme il se doit.
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