#432
murs carrelés trône de porcelaine récuré à la javel caleçon sur les chevilles serviette de bain bleue bouteilles parfums de luxe crèmes périmées panière en osier humide tableaux du père énième paysage du Gers rouleau de papier toilette entamé cuisses de chair velues en short noir débardeur mur blanc photos de famille lit deux places lumière sombre peau mate torse nu petit ventre sans abdominaux constellation de grains de beauté sur torse imberbe étouffante moiteur drap sur les genoux coussin derrière la tête respiration ronflements voix échappée du rêve de celle tournée de son côté du lit vue sur fleuve la nuit les bateaux meuglent comme des vaches le cri des coqs ressemblent à s'y méprendre au hurlement du loup bébé pleure interrompt la nuit d'écriture jusqu'au petit matin banquette rectangulaire en marbre vert mur en miroir le fleuve et son reflet à l'infini vue sur ciel couvercle noir de l'orage qui gronde aboiement du chien voisin dans le couloir le vent claque les portes made in china en fond téléfilm chinois doublé que personne ne regarde bruit de tire-lait on dirait les battements de coeur d'un robot murs de vieil immeuble ciel ouvert pas pressé en retard chemise rentrée dans le pantalon café dá à 10 000 dôngs ventilateurs poussiéreux livres de FLE oranges tableau blanc date du jour aux feutres noirs déjà secs salle vide sur la carte de France la ville natale n'est plus qu'un nom fenêtre sur parking d'une centaine de mob' attendre que l'heure vienne qu'elle passe sortir marcher devantures des boutiques postures de vendeurs ambulants arriver murs parmes aquarelles à vendre immense ardoise noire des plats du jour à la craie bleue jaune rose chaise peu confortable béton ciré cercle de bois pieds en fonte bol tasse de café théière cuillères baguettes salière poivrière serviettes pub du vin du mois serveurs à l'affût de la moindre main levée bribes de paroles en vietnamien mandarin anglais français coréen "com Tam" oeufs Bénédict sans sauce hollandaise burger gras sandwich aux légumes à la Feta Perrier citron manger sortir se poser enfin plus de murs banc de pierre blanche grisonnante arbres verts immatriculés comme des prisonniers fleurs mortes avant d'avoir écloses hurlements de gamins déchainés gardiens retraités le nez dans les journaux locaux à l'air climatisé silence de médiathèque profs préparent prochain cours étudiants concentrés endormis sur cahier ouvert et un enfant toujours le même qui jamais ne joue avec ses camarades qui préfère lire seul au calme en attendant papa au coeur des livres de poésie jamais empruntés lire écrire paresser jusqu'au soir jusqu'à que le ventre grouille à nouveau rentrer moto traverser la lumière des ponts après l'orage prendre le tronc d'un arbre mort pour la sculpture d'un cheval noir s'arrêter sur un bord de route mi-ville mi-jungle échouer à photographier l'odeur de pluie repartir rentrer entre nos murs blancs trois esquisses de Paris nature morte des trois citrons odeur du bon dîner bébé dort vue sur la rivière Nhà Bè dans les miroirs reflet des lumières de la ville illuminée sofa en bois de rose hors de prix petite bibliothèque 50 livres pas plus pas pu amener plus en partant il y a dix ans tant pis désormais tout est dans l'écran de lumière l'encre noire les livres romans poésies essais dictionnaires la langue des autres en partage l'anonyme fraternité ce qui se passe dans la vie le quotidien des jours travaillé archivé ici dans ce rectangle blanc posé là n'importe où dans Saigon un café un appartement au jardin au bureau à la bibliothèque au restaurant dans la rue sur les routes aux toilettes dans le lit de jour comme de nuit pas de table mais une tablette de travail en perpétuel mouvement à portée de main corps numérique qui note trace des mots des voix des images solitude mise en partage parce-que vital est le désir de partager...
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