#221



J'ai trahi le silence auquel j'aspire. Je continue en cet instant même cette trahison en écrivant à son sujet. Je n'ai cessé de remettre au lendemain le jour où je détruirai le je de ce carnet croyant naïvement extirper sa parole de ma propre voix, de mon corps tout entier. Je pensais pouvoir assujettir ce pronom dans un enclos de fiction pour à la fois me dire et m'échapper de ce "dit". Échec cuisant : la bête qu'est mon insupportable moi a depuis des mois repris ses libertés au détriment de l'écriture. La moindre introspection, aussi sincère soit-elle, me semble aujourd'hui obscène sortant de la bouche de ce je là. Comment le nier plus longtemps : ce je se prend pour ma chair, ma salive, mon sperme, mon sang. Je ressemble comme deux gouttes d'eau à ce que j'écris. J'ai honte. Il est grand temps de me refaire le portrait. Avec un souhait. Un seul : que ma parole périsse dans les fictions à venir.








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