#626

 


L’inconnue de confiance (2)


    au loin 

    venu d’une mer

    invisible un bateau

    meugle 

                                   

lentement

je laisse le doute de votre présence

mûrir


        jusqu’au pourrissement


j’attends que votre absence 

me réponde

j’attends l’écho du cri 

jamais lancé


rétention de silence

message intime effacé


      entendez-vous

mon bruit d'ongle

gratter les murs 

de l'infime et sombre 

espace

contenant le cri

d'une phrase infirme

sans sujet


m’entendez-vous 

tenter de vous atteindre

entendez-vous mes gestes 

d’estime


à la fenêtre

la seule encore allumée

la lueur de l’ écriture clandestine 

veille sur la ville profondément 

endormie


ma nuit échoue -  

le refuge de votre écoute s'écroule 

sous mes yeux seuls et affamés 

de présence


plus que le bruit des pas perdus dans les ruines 


l’écriture invoque les esprits 

du lieu détruit pour me montrer

le chemin


toute la nuit mes mots courent après leur foi

ils cherchent à croire en vous

vous la familière inconnue

reconnue à votre façon de vous taire

débarrassé du visage

je distingue enfin notre air de famille


mais le mirage de notre ressemblance s’évapore en quelques secondes

comme chaque nuit je vous ai prise pour mon ombre 

engageant seul un dialogue

à l’heure où le noir 

du refuge prend 

des couleurs d’univers

sans point de mire

que de luttes vaines 

pour arriver à bout 

d’un vers


l’insomnie reste un pont inachevé


n’être plus que ça

un trait à quelques lettres du traître

ne même pas être l’écrit

mais la présence de la nuit elle-même


Commentaires

Claudine a dit…
De l'autre côté de la nuit et du monde, je vous fais un signe amical
Claudine
Anh Mat a dit…
amitiés apatrides...
oui, "l'écriture clandestine" devra ou devrait garder bien caché son statut hors-norme, hors les murs, comme un samizdat déjouant la propagande d'un tyran, le stylo contre le missile, la pensée contre le bréviaire remâché.